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série linéaire. Nous n’avons pas dépassé l’argument éléatique. Nous y avons échappé, ce qui est tout différent. Par le ministère d’un grand philosophe, nous avons pris une certaine vue de la réalité, une vue directe, une immédiate saisie, d’où ensuite nous nous sommes aperçus que l’argument éléatique n’était qu’une vue de l’esprit, et à ce titre ne pouvait prévaloir contre une vue de la réalité.

Deuxième exemple, on m’opposera qu’une bonne partie de l’Esthétique transcendantale a été non pas seulement précisément démolie, mais décontenancée par un chapitre au moins de l’Essai sur les données immédiates ; démolie ou décontenancée, ce serait donc en tout cas dépassée. Et il est de fait que nul aujourd’hui et désormais ni toujours ne pourra plus parler du temps et de l’espace, particulièrement considérés comme des formes de la sensibilité, nécessaires et a priori, c’est-à-dire nécessaires et antérieures à toute expérience, extérieure, sans intercaler, sans faire intervenir ceci : que l’assimilation, que le parallélisme établi et consacré du temps à l’espace a été lui-même attaqué, comme le point central, comme le réduit, comme le nœud de résistance, et de faiblesse, comme le défaut de l’armure, presque initial, particulièrement bien placé, particulièrement bien trouvé, sinon de tout le kantisme, au moins de tout le kantisme critique, ou de tout le criticisme kantiste, que cette assimilation et que ce parallélisme a été nié, critiqué lui-même, qu’ainsi le critique a été critiqué, lui-même, et qu’enfin nous sommes donc là en présence d’un fait nouveau, d’un fait acquis, une fois pour toutes, d’un progrès, comme il y en a dans la science.