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aucuns dépassements, il n’y a aussi nuls remplacements non plus. Et je ne dis pas même des remplacements totaux et bout pour bout. Ce serait une folie que de s’aller imaginer qu’une métaphysique moderne puisse ainsi remplacer totalement, suppléer bout pour bout une métaphysique antique dans le chœur universel, ou aussi et aussi bien qu’une métaphysique antique païenne eût pu suppléer totalement la longue monodie hébraïque. Dans cet ordre ce qui vient est toujours unique, et ce qui manque, manque. Ce qui ne vient pas manque éternellement. Une race, un art, une œuvre, une philosophie qui manque, manque éternellement. Une métaphysique de race et d’homme, de nature et d’œuvre qui n’aboutit pas, qui ne rend pas, qui manque, fait éternellement faute. Si la philosophie antique platonicienne et plotinienne, comme la race hellénique une fois pour toutes n’était point venue au monde, elle manquait, et manquait éternellement. Et nulle de ses illustres successeurs ne la pouvait aucunement suppléer, je ne dis pas même totalement, je dis non pas même partiellement. Car ce serait encore une grossièreté que de croire et de s’imaginer qu’il peut y avoir, en une telle matière, des remplacements même partiels. Car il ne s’agit nullement, dans cet ordre, de parties et de touts qui se recouvriraient plus ou moins. Mais il ne s’agit que de tons. Une philosophie qui est, qui vient d’une tout autre race, est toujours une tout autre philosophie, étant d’un tout autre ton. Si la philosophie platonicienne et plotinienne antique n’était pas née d’une certaine race, d’un certain peuple, sous un certain ciel et dans un certain climat, elle manquait, et nulle autre philosophie, née d’une autre race, d’un autre peuple,