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physique. Tout le monde en fait. Tout le monde en a. Rien n’est aussi répandu. Seulement, non seulement tout le monde n’a pas la même, ce qui n’est que trop évident, mais tout le monde n’en a ni de la même sorte, ni du même degré, ni de la même nature, ni de la même qualité.

Rien n’est aussi portatif, si l’on veut, que la métaphysique. Tout le monde a la sienne, inconsciente ou consciente, intellectuelle ou réelle, officielle ou libre. Et ce qui serait difficile, et ce qui est même rigoureusement impossible, ce serait de n’avoir pas, ce serait que quelqu’un n’eût pas sa métaphysique ou du moins de la métaphysique.

Tout le monde a sa métaphysique ou au moins de la métaphysique. La métaphysique est comme ces vieilles gens disaient qu’était le vin. On porte sa métaphysique tout de même qu’on disait sous l’ancien régime et dans l’ancien langage que les vignerons portaient le vin. Je dis l’ancien régime et l’ancien langage, car de même qu’il y a un monde moderne et qu’il y avait un monde ancien précédent, tout de même, ou plutôt par une application particulière, en un cas particulier, il y avait une ancienne ivresse, qui était l’ivresse du vin de la vigne, et il y a une ivresse moderne, qui est le delirium tremens de l’absinthe et autres alcools frelatés. Les bons ont la métaphysique bonne. Les mauvais l’ont mauvaise. Les méchants l’ont méchante. Les gouvernements et les gouvernementaux l’ont gouvernementale. Les autorités et les autoritaires l’ont autoritaire. Les politiques l’ont politique. Les politiciens l’ont politicienne. Les parlementaires l’ont parlementaire. Les imbéciles l’ont imbécile.