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CHAPITRE IX

Idjma’â es’s’ah’aba


Les Sounnites entendent par idjma’â es’s’ah’aba l’accord unanime, exprès ou tacite, des disciples directs du Prophète, sur des points de doctrine et de jurisprudence non prévus dans le Koran et la tradition. C’était de leur part une interprétation publique de la loi divine, interprétation que les Sounnites admettent aveuglément et qui leur sert de base pour l’interprétation qui, aujourd’hui, n’est plus que privée et est laissée à chaque individu qui possède l’idjtihad, ou la science dite el fiqh, science soumise à des règles dont l’ensemble constitue l’art de l’interprétation.

C’est après la mort des quatre premiers kalifes que les décisions des compagnons du Prophète ont été recueillies, puis consignées dans les livres de jurisprudence, et que les sectes actuelles ont commencé à bien se dessiner et à prendre une consistance qui les a rendues fortes et indépendantes les unes des autres, à ce point que l’individu a pu afficher son opinion sans craindre d’être persécuté, ce qui n’avait pas lieu sous Mahomet et les quatre premiers kalifes, qui étaient tout à la fois pontifes et princes et qui ne souffraient ni le schisme ni l’hérésie ; ce qui faisait dire à Mahomet, lorsqu’il s’adressait à des musulmans qui n’admettaient certains points de sa doctrine qu’ostensiblement, qu’ils étaient des mounafiqoune ou des hypocrites.

Les disciples directs du Prophète n’ont jamais formé de conciles. Leurs décisions étaient individuelles, et lorsque,