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importance dans le département, par son habileté, sa faconde et ses opinions libérales.

Quant au café, éclairé au gaz et tapissé de glaces à l’instar de Paris, c’était un des plus brillants de la province, et l’une des gloires municipales de la ville d’A***. C’était le Café de la Mairie.

En ce moment, Vanvré désirait sans doute obtenir les bonnes grâces de son partenaire, car il calculait son jeu de façon à le laisser gagner.

Évidemment, l’adjoint faisait la sourde oreille et semblait peu disposé à l’hostilité envers Manoquet, jadis son maire, et actuellement la fleur des éligibles et la perle des électeurs.

Mais, il n’était que huit heures et demie, et Vanvré devait le posséder jusqu’à dix heures au café. Puis, Mannequin demeurait à une bonne portée de fusil de la Place de la Mairie, et il pouvait le reconduire ; c’était encore un quart-d’heure de plus.

Ce fut donc avec une sage lenteur que Vanvré savoura son café après la première partie de dominos. À chaque gorgée il faisait claquer sa langue avec la douce satisfaction de l’homme qui digère en caressant son dada favori, et sûr de son effet.

L’adjoint, non moins enfoncé dans les jouissances de la gastronomie, jetait un coup d’œil circulaire autour de lui et contemplait les consommateurs du Café de la Mairie ; c’étaient tous des gens bien famés dans le canton, ayant des rentes ou de beaux biens au soleil, comme il