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vivement le voir partir, pour se trouver seule avec elle-même et se rendre compte de ses sentiments.

M. Margerie comprenait parfaitement l’embarras réciproque des deux jeunes gens, mais sa situation de tiers n’était pas moins gênante. Il cherchait en vain à relever la conversation, à attirer l’attention sur les travaux à entreprendre, sur l’état du pays, etc. : rien ne réussissait. Lui-même, d’ailleurs, savait trop à quoi s’en tenir sur les idées du vicomte de Mauguet et sur l’amour profond et inguérissable de Louis, pour ne pas être inquiet de l’avenir.

Il aurait voulu hâter le moment de la séparation. Les heures lui semblaient longues à passer entre trois personnes agitées par la même pensée, et décidées à fuir toute explication, il pouvait facilement partir avant le soir, en prétextant une visite à faire à quelque malade ; mais Louis et Jeanne, en tête à tête, ne seraient-ils pas plus embarrassés encore ?

Heureusement que chacun éprouvait le même besoin de solitude : Louis, par peur de compromettre sa position d’ami en s’avançant davantage soit auprès de Jeanne, soit même auprès de M. Margerie ; Jeanne, pour avoir le temps de se rendre compte de son trouble et de ses émotions, pour prendre un parti vis-à-vis d’elle-même.

Aussi, dès que le repas fut fini, le docteur et Louis s’occupèrent-ils de leur départ. M. Margerie dit que le temps paraissait à la pluie, et Louis s’empressa d’accepter ce prétexte.