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cette intimité d’ami qui, depuis un an, le rendait si heureux.

Jeanne, elle, se sentait agitée d’émotions inconnues. Elle avait besoin de toute sa volonté pour cacher son trouble. Depuis quelques jours, elle ne pouvait manquer de s’apercevoir que Louis l’aimait avec un enthousiasme qui touchait de près à la passion ; mais la différence d’âge, dont elle s’exagérait beaucoup les effets, mais la distance que mettaient entre eux mille choses et mille idées, l’avaient empêchée de croire à un amour sérieusement affermi par l’espoir du mariage.

Et puis, jamais elle n’avait songé au mariage. Dès l’enfance, elle s’était destinée à la vie religieuse. Plus fard, lorsque, après la dispersion de son couvent et pendant son séjour à Paris chez mademoiselle de Brives, elle trouva des prétendants enrichis qui ambitionnaient l’alliance d’une fille noble, elle ne fit que rire de leurs prétentions. Jusqu’alors, elle s’était regardée comme engagée par le vœu de sa famille, par son noviciat au couvent de Beaulieu, par la force même des choses. Pour la première fois, elle se dit qu’elle était libre et maîtresse d’elle-même, qu’elle était aimée et qu’elle allait être forcée de répondre : oui ou non.

Elle avait peur aussi… peur de répondre et peur de se taire. Elle s’effrayait des mouvements intérieurs qui l’agitaient et qu’elle ne pouvait contenir. Elle n’osait ni regarder Louis, ni lui adresser la parole sur les choses les plus indifférentes. Il devait retourner à Limoges le soir même. À cette heure, elle désirait