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tilshommes. Oui, vraiment ! Dans les salons, ils s’appliquent avec fureur à copier les façons de la bonne compagnie ; leur plus cher désir est d’être admis dans la société des ci-devant qui ont, pour un peu, goûté au brouet révolutionnaire. M. de Brives était un des représentants les plus entourés depuis quelques années. Pour mon compte, je recevais chez lui les adulations de tout un petit monde de regrattiers, enrichis à vendre les dépouilles de l’aristocratie, qui aspiraient à devenir aristocrates à leur tour. Jamais la noblesse n’a valu si cher qu’à présent. Il y a des fournisseurs qui payeraient des millions l’alliance d’une fille noble, fût-elle laide et bossue. En vérité, ces gens et ces choses ne valent pas la haine. Ne confessent-ils pas leurs crimes, puisqu’ils nous adorent ? Rions, monsieur le marquis, disais-je à M. de Brives, qui s’indignait de la lâcheté humaine, en regrettant au fond du cœur son castel en Périgord, son habit de chasse et ses illusions.

La conversation, mise par Jeanne et le docteur sur le terrain de la politique et de la nouvelle organisation sociale, continua longtemps. On effleura tous les sujets, on discuta toutes les idées en cours. Louis, qui avait aussi vu de près toutes les orgies révolutionnaires et touché à toutes les questions brûlantes du moment, sortit de ses rêves pour se mêler à la discussion et y jeter ses mots vifs, ses aperçus profonds, nouveaux, pittoresques ou railleurs.

À onze heures seulement, heure indue jadis au