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— Volontiers. Cher et excellent docteur, tout ce que vous venez de dire me plonge dans des réflexions sans fin. Jamais, je l’avoue, dans mes rêves, qui toujours ont eu la même direction, je n’avais entrevu ce moyen simple et pratique d’être utile à ma famille. Mais… vous me connaissez, M. Margerie, et vous aussi, mon cher abbé ;… vous savez quelles aspirations font battre mon cœur… quelle ambition exalte mon courage… Ah ! vous aviez raison tout à l’heure, Louis ;… si j’étais née aux temps héroïques, j’eusse peut-être illustré ma maison !… Mais ne croyez pas, mes amis, que je sois poussée par l’orgueil personnel ; non. Aujourd’hui que le dévouement d’une femme s’exerce dans l’ombre, et que le retentissement de ses plus belles actions ne doit pas dépasser son foyer, je me sens prête à tous les sacrifices, à tous les travaux, à toutes les patiences, pour refaire un héritage au fils de mon frère…

— Bien ! mademoiselle, s’écria l’abbé Aubert. Vous êtes une noble fille, et une fille noble !

Mademoiselle de Mauguet se leva en le remerciant d’un regard. On récita les grâces, puis on reprit le chemin du salon.

Jeanne rayonnait. Elle semblait inspirée. Jamais, peut-être, elle n’avait été aussi belle qu’en ce moment. C’est que jamais, ou depuis bien longtemps au moins, elle ne s’était trouvée dans un milieu si sympathique. C’est que jamais elle n’avait trouvé l’occasion de crier si haut les vrais sentiments de son cœur.