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Oh ! non ! mademoiselle. Monsieur Maillot, comme disent ceux qui veulent avoir ses grâces, n’est pas encore assez puissant pour ça… C’est des idées de Paris que vous avez là.

— Assez là-dessus, Myon, nous avons à parler d’autre chose avec ces messieurs.

— Nicou ! reprit la redoutable Myon sans tenir compte de la défense de sa maîtresse, Nicou !

La paysanne, qui tenait la tête baissée, la releva par un mouvement machinal et fixa ses yeux ronds sur son interlocutrice.

— Nicou, penses-tu que le maire de Saint-Jouvent, Monsieur Maillot, comme on dit à présent, oserait bien me faire mettre en prison, moi ?

— Ça n’est pas possible ! répondit Nicou avec l’accent d’une conviction si solide que mademoiselle de Mauguet ne put retenir un sourire.

Rien au monde ne donnerait une idée de l’expression de respect craintif et d’obéissance aveugle qui se peignait sur les traits de Nicou à la voix de Myon. Les séides du Vieux de la Montagne ne devaient point être soumis à une fascination si grande.

— Allez souper à votre tour, mes bonnes filles, dit Jeanne, quand les plats chauds furent enlevés et qu’il ne resta plus sur la table que les châtaignes et quelques fruits secs.

Myon sortit d’un pas solennel et à reculons ; Nicou suivit en emportant de la vaisselle et en faisant claquer ses sabots.