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serait défendu convenablement, reprit Myon avec dignité.

— J’étais bien sûre de l’intention, ma bonne Myon ; mais votre seule volonté n’aurait pas suffi pour arrêter les malfaiteurs, si le château avait été sérieusement attaqué.

— Oh ! oh ! fit la servante en hochant la tête, on ne me méprise pas si fort dans le pays ! On sait que je suis bien avec les charmeurs et les remégeuses, et si je voulais du mal à quelqu’un… pas vrai, Nicou ?

Nicou, en français Nicole, était une grande fille dégingandée et mal bâtie, qui se tenait sur le seuil de la salle, et dont l’aspect contrastait absolument avec celui de Myon. Elle portait le jupon court en droguet, le tablier de cotonnade, le fichu à fleurs et la coiffe à grandes ailes que les paysannes appellent un barbiché. Son visage plat, irrégulier, couvert de taches de rousseur, ses yeux ronds et inquiets avaient l’expression de la crainte et de l’idiotisme.

À l’interpellation de Myon, elle jeta un regard de côté, baissa la tête et répondit en frémissant :

— Ah ! c’est bien sûr !

Myon, ou Marie, posa ses poings sur ses hanches avec un air de satisfaction et de puissance calme qui pouvait se traduire ainsi :

— Vous voyez, mademoiselle, que mon autorité est bien établie, que je règne aux environs, que j’ai un ascendant reconnu sur Nicou et, en général, sur toute la maison.