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prétextes, d’éloigner le vicomte, qui refusait de quitter sa femme et se désespérait.

Le docteur annonça une fièvre cérébrale. La patiente fut saignée, on lui mit de la glace sur la tête, des sinapismes aux pieds. Le curé pria pour elle et fit prier Pierre. Jeanne passa les nuits à son chevet, sans cesser un instant de lui donner les soins les plus tendres ; il lui semblait vraiment qu’elle avait été le tourmenteur et le bourreau de la femme de son neveu.

— C’est moi qui l’ai tuée ! dit-elle, un jour, à l’abbé Aubert, en pleurant.

Le danger dura longtemps. Marguerite de Mauguet toucha aux portes de la mort, et toute la famille crut, un moment, que la vicomtesse allait laisser orphelin cet enfant pour lequel on l’avait gardée pure… à quel prix ?

Enfin, les saignées, la glace et les sinapismes éteignirent la fièvre en épuisant les forces et la vie. Un jour, la vicomtesse fixa sur les visages qui l’entouraient ses yeux depuis longtemps sans regards, et reconnut sa tante, son mari et son fils. Elle rappela ses souvenirs, vacillants encore, pleura, et dit à Jeanne avec un accent de tristesse infinie :

— Pourquoi donc m’avoir empêchée de mourir ?

Tout le monde, autour d’elle, s’épuisait en soins et en tendresses ; peu à peu, les forces revinrent avec la raison, Marguerite entra en convalescence.

Seulement ses cheveux avaient blanchi ; son visage s’était flétri, sa taille se courbait, et un tremblement