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— Mademoiselle, reprit-il, je ferai mon devoir. Adieu.

Elle referma la porte et rentra dans la chambre.

Marguerite s’était levée au bruit de la clef tournant dans la serrure. Jeanne la trouva debout, les yeux hagards, le visage contracté par une expression farouche.

— Ainsi, dit-elle, il est parti ?… Vous me l’avez arraché… Tout est fini !…

Il y eut une seconde de silence, puis la vicomtesse courut à la porte et la secoua.

— Ouvrez-moi, disait-elle, que je le voie encore une fois… de loin… que je lui crie un adieu suprême…

— Venez voir Pierre qui dort, répondit Jeanne en s’efforçant de la calmer.

Marguerite retourna sur ses pas, morne et froide. Elle retomba dans son fauteuil, et reprit d’un air égaré :

— Il est parti !… c’est-à-dire la jeunesse et la vie… tout !… faites creuser ma tombe !

Puis les larmes, un moment taries, recommencèrent à couler. Il faisait petit jour. Jeanne éteignit la lampe, déshabilla sa nièce, et la mit au lit comme un enfant.

— Je vais vous apporter votre fils, dit-elle ; du courage, Marguerite !

Mais la pauvre créature n’entendait plus rien. Elle tremblait et sursautait dans son lit ; ses dents claquaient et elle répétait :

— Il est parti !…

C’était le délire.