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désagréablement frappée par un refrain de Béranger, que fredonnait, en manière de bravade et de répons au pieux chant de l’orgue, la grosse voix de Maillot.

Le bourgeois venait de descendre de cheval devant sa porte, et jetait à sa servante, avec ses guides, des paquets de victuailles.

— Eh ! bonjour, M. Thonnerel ! enchanté de vous rencontrer ! Comment vous va depuis l’année passée ? s’écria-t-il, en s’interrompant soudain à la vue du conseiller d’État.

— Merci ! M. Maillot, je vais bien. Pour vous, je suppose, à voir votre figure, que vous vous portez au mieux ?

— Eh ! eh ! pas mal. Un peu enroué ; vous avez pu l’entendre tout à l’heure ! mais voilà ce que c’est que de courir le guilledou au clair de la lune, comme j’ai fait cette nuit ! hum ! hum ! Il n’y a que les amoureux qui n’attrapent pas de mal à ce jeu-là !

La vicomtesse reçut le coup au cœur, car elle ne pouvait pas s’y tromper, et le regard incisif dont Maillot accompagna ses paroles lui était franchement adressé.

Quel châtiment ! quel soufflet appliqué en plein visage ! et par cette main !

Maillot !… oui ! l’insulte dans cette bouche était le plus rude châtiment qu’elle aurait pu rêver et celui auquel jamais elle n’avait pensé !… Maillot !… Il représentait l’opinion, mais cette opinion qui part des bas-fonds sociaux et ne saurait juger sans flétrir. Il