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et c’est à peine si les gelées blanches les ont grillées au bord. Il semble que le soleil, en dorant ces feuilles roussies, brille d’un éclat plus chaud. L’air est vif et doux en même temps. La nature paraît toute gaie et toute pimpante. Et que de monde sur la route ! C’est aujourd’hui la foire de Conore et, sans doute, tous les gens de Nieulle et de Périllac y vont aller en sortant de la messe.

— Probablement, répondit la vicomtesse, pour répondre quelque chose.

La campagne inondée de soleil, riche encore de toutes les richesses de l’automne, était en effet admirable à voir par ce jour de fête ; tandis que de toutes parts surgissaient des groupes de paysans endimanchés qui se rendaient à l’église, les cloches tintaient le second coup de la messe et la pureté de l’air rendait leur tintement plus sonore. Les chevaux hennissaient dans les prés, les enfants couraient sur la lisière des châtaigneraies, les jeunes filles babillaient en pressant le pas, et leur marche bondissante faisait chatoyer les couleurs éclatantes de leurs fichus de soie à fleurs et de leurs jupes rayées de rouge. Les femmes étalaient au vent les grandes ailes de leurs barbiches de dentelle, et leurs maris portaient fièrement la veste de droguet et le chapeau de feutre noir.

Chaque groupe en passant saluait respectueusement les châtelains, et surtout mademoiselle de Mauguet, qui connaissait toutes les familles et n’en laissait