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traversait un pré couvert de vapeur se dessinait sur le paysage. Bientôt l’officier la vit disparaître dans les grands arbres qui entouraient le château et les étangs. Il partit à son tour, en se disant à lui-même :

« C’était un renard… un chien errant… ou bien un chasseur en maraude… Mais certainement la rencontre était fortuite… car personne dans le voisinage ne peut avoir de soupçon… et ceux qui ont le droit de surveiller Marguerite ne s’enfuiraient pas en me voyant… »

La vicomtesse se glissa contre les chênes, gagna la terrasse, puis la plate-forme. Mais, soudain, arrivée devant sa fenêtre, elle poussa un cri, s’arrêta court et faillit tomber à la renverse dans l’étang ; puis elle demeura immobile devant cette fenêtre comme la vivante statue de la terreur.

Pourtant elle ne voyait en face d’elle aucune figure encadrée dans le châssis de la croisée ou se dessinant dans la pénombre. Seulement, la chaise dont elle se servait pour descendre et remonter n’était plus là sur la plate-forme, et le dossier en apparaissait à l’intérieur, au bord de l’appui de la fenêtre. Ce dossier, que le clair de lune détachait par une ligne lumineuse sur le fond sombre, semblait de feu à Marguerite. Elle croyait y voir l’empreinte d’une main accusatrice et vengeresse. Ce simple changement disait si bien :

« Vous êtes découverte, madame… et si je voulais, vous seriez perdue… J’ai pitié de vous et je laisse à votre portée le moyen de rentrer dans votre chambre.