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Marguerite s’assit et s’accouda sur le lit. Elle était fort pâle et ne pouvait dominer un tremblement nerveux qui secouait ses mains et contractait ses lèvres. Jeanne, M. Thonnerel, le curé, lui prodiguèrent les paroles affectueuses tour à tour. M. Margerie l’engagea sérieusement à s’aller mettre au lit. Mais ces soins et cette tendresse lui firent plus de mal encore.

— Ne vous occupez pas de moi, je vous en prie, répondit-elle simplement. Je n’ai rien. Tout à l’heure, quand Pierre ne toussera plus, je serai tout à fait remise.

Cependant, il lui semblait que son heure suprême allait sonner, lorsqu’elle entendait, dans le château, les bruits ordinaires de la journée : elle pensait que les domestiques faisaient les chambres et qu’ils trouveraient peut-être moyen d’ouvrir, sans la clef, la porte de son cabinet de toilette. La fièvre la dévorait, elle perdait le sentiment de la vie réelle ; ses yeux et son esprit se troublaient comme si elle avait vu la hache du bourreau suspendue sur sa tête.

On apporta une collation vers les midi. Comme la toux de Pierre cessait d’être alarmante, tout le monde se mit à table avec cette sorte de bien-être qui suit le soulagement, après les grandes crises. Marguerite, cependant, ne pouvait manger ; elle lançait des regards inquiets autour d’elle, en s’efforçant de saisir un moment propice pour glisser dans sa poche un morceau de pain, qu’elle destinait à son amant. Elle y parvint enfin, vers la fin du repas. Alors, elle ne son-