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Peut-être, au premier aspect, n’eût-on pas deviné toute la force de caractère et toute la grandeur d’âme de Jeanne de Mauguet. Mais en voyant sourire cette bouche si bienveillante et si bonne, en entendant cette voix douce et sonore en même temps, on ne pouvait douter des richesses de son cœur.

Elle comptait alors trente ans. C’était une femme dans toute la force de l’âge, et pourtant elle conservait une expression de candeur juvénile et charmante. Destinée dès l’enfance à la vie religieuse, et l’esprit naturellement porté vers les hautes aspirations, elle avait consacré à l’étude et à la réflexion les premières années de sa jeunesse. À seize ans, elle quitta Mauguet pour aller au couvent de Beaulieu d’Angoulême. Elle devait y terminer d’abord les études ébauchées près de sa mère, sous la direction du curé de Saint-Jouvent, puis faire profession et prendre le voile.

Le couvent de Beaulieu était célèbre dans l’Angoumois et les provinces limitrophes. Toutes les filles nobles y venaient faire leur éducation de trente lieues à la ronde. Aujourd’hui encore, les maisons d’éducation d’Angoulême reçoivent des pensionnaires du Bordelais et du Limousin. On y vient apprendre à parler un bon français, et perdre l’accent méridional.

En 93, le couvent fut dispersé. La supérieure périt, je crois, sur l’échafaud ; quelques-unes des religieuses l’y suivirent, d’autres parvinrent à se cacher. Les pensionnaires rejoignirent leurs familles. Jeanne de