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Marguerite eut un frisson de remords, en songeant qu’il y avait près de là, honteusement caché dans sa chambre, un homme jeune et agile qui faisait toutes les nuits cette route pour trahir un ami et perdre une femme, et qui resterait blotti dans sa cachette, tandis que le père abandonnerait, pour courir chercher du secours, le lit de son fils mourant.

Le docteur était entré tout ému, tout ruisselant, car il pleuvait encore, et aussi vite que le permettaient les années. Il saisit le pouls du petit malade, écouta sa toux étranglée, l’ausculta et pâlit.

— Il est trop tard ?… demanda Jeanne épouvantée.

— Non, mais il faut agir vite… Éloignez-vous tous… donnez de l’air… bien !… — Maintenant dans quoi vais-je administrer l’émétique ?

On lui tendit une tasse de tisane, il prépara le médicament et le présenta au malade qui le repoussa en pleurant.

— Madame la vicomtesse, venez m’aider !

Marguerite s’élança ; mais Jeanne était arrivée la première, et les regards attendris et suppliants de l’enfant se tournaient vers elle.

La mère se recula, toute pâle, et avec une blessure de plus au cœur.

En ce moment, tandis que Jeanne penchée vers son petit-neveu, lui présentait la potion en l’embrassant et en le priant ; tandis que Pierre, magnétisé par cette tendresse, se laissait convaincre, approchant et reculant, tour à tour, ses lèvres blémies de la tasse, un