Page:Cadiot - Jeanne de Mauguet.djvu/256

Cette page n’a pas encore été corrigée

lit, les yeux fixes, l’oreille tendue, la respiration arrêtée, que sa vie entière était attachée à cette frêle vie, qui, faute d’un secours rapide, allait peut-être s’éteindre. C’est que ce berceau, en effet, renfermait toutes ses espérances ; sur cette jeune tête, elle avait posé son dernier amour et le but de tous ses dévouements. Pierre de Mauguet, heureux, bien portant, riche, intelligent, grand seigneur par sa naissance et sa fortune comme par sa valeur personnelle, n’était-ce pas le résultat de cinquante années de luttes et d’efforts ? le prix de son cœur offert en holocauste sur l’autel de la famille ? le triomphe auquel d’autres êtres, pleins de valeur, avaient immolé leur bonheur terrestre ?…

Quel trésor ! parfois, qu’un enfant ! combien d’amour et de sacrifices se sont réunis autour de cette petite créature vagissante que le moindre accident peut détruire ? Il vit à peine, et déjà, des femmes brillantes, des hommes puissants et forts sont ses esclaves et l’adorent à genoux. N’est-il pas l’Avenir ?… l’Avenir ! ce magique horizon sur lequel nos yeux se reposent pour ne pas voir le triste présent !… L’Avenir ! sur lequel nous comptons pour payer toutes nos déceptions, tous nos dégoûts, toutes nos douleurs !… il apparaît, autour de ce jeune berceau, comme une auréole de vapeur lumineuse et diaprée, dans laquelle dansent les fées propices. Rien ne se définit, dans ces espérances radieuses ; aucuns contours ne s’arrêtent, dans cette vision enchanteresse : c’est vague, c’est immense, c’est riche comme l’infini !