en mettant un pied sur la chaise et en tendant les deux mains à son amant.
Elle sauta lestement, releva sa robe et suivit les anfractuosités du rocher en s’appuyant aux murs. Emmanuel la conduisait en frémissant, car cette roche descendait à pic jusqu’à l’étang, et un pas mal assuré pouvait les précipiter tous deux.
Ils eurent vite gagné l’autre côté du manoir. Alors, par un tacite accord, ils descendirent en courant les rampes qui menaient au bois. On eût dit que, se sentant coupables, ils cherchaient l’ombre qui pouvait les cacher aux regards de leurs juges ; mais un autre sentiment faisait battre le cœur de Marguerite. C’était un ardent besoin de liberté, une soif passionnée de se soustraire, au moins un instant, à toute dissimulation. Elle était si lasse de jouer la comédie !
S’il avait fait jour en ce moment, on aurait pu voir son visage se transfigurer comme si une flamme intérieure l’eût fait resplendir. Elle s’assit sous un orme, au bout de l’étang, abandonna une de ses mains à Emmanuel, appuya sa tête sur l’autre et plongea ses regards dans l’eau comme pour y compter les reflets des étoiles.
Une profonde mélancolie succédait tout à coup au premier enivrement de la liberté, car sa raison n’était pas encore tout à fait éteinte au fond de sa conscience, et elle se disait en tremblant : Quelle sera la fin ?…
— Marguerite, murmura l’officier qui tremblait aussi en pressant la main de sa maîtresse, quel délicieux