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tout et ne donnant ni un nom ni un terme à ses espérances.

Cependant cette vie si régulière et si ouverte de Mauguet, ne se prêtait guère aux allures tortueuses de la passion illicite. La plus simple démarche en dehors des habitudes établies, pouvait être remarquée et faire naître le soupçon. Tous les yeux s’ouvraient sur les actes de la pauvre vicomtesse ; non par méfiance injurieuse, mais naturellement par cette sorte de curiosité qui s’attache aux Parisiens transplantés en province. Sans qu’on s’en rendit compte, on avait toujours considéré madame de Mauguet comme une étrangère, ou, pour mieux dire, comme une greffe entée sur le tronc d’un vieil arbre. On remarquait en elle des goûts inconnus jusqu’alors dans le pays, et on lui supposait des intérêts séparés de ceux de sa nouvelle famille ; peut-être aussi n’avait-elle pas cherché à se concilier les cœurs et à rentrer dans le moule coûlé pour elle par des esprits rigides et prévenus. Enfin, qu’elle l’eût mérité ou non, elle trouvait dans son entourage des dispositions analogues à celles qui accueillirent Marie-Antoinette à la cour de France.

L’admiration et l’amour qui s’étaient attachés à Jeanne, nuisaient aussi à sa jeune nièce. L’esprit humain est ainsi fait ; on ne se demandait pas si la vicomtesse avait été à même de montrer du courage et du dévouement, on se disait seulement qu’elle n’était bonne à rien, ni aux soins du ménage, ni à la fortune de sa maison, ni à l’éducation de son fils.