le pouls vous lui dites qu’elle a la fièvre, elle essayera de se guérir.
— Ah ! reprit le docteur, toutes les femmes ne sont pas des Jeanne de Mauguet ! les natures si belles sont rares ; et pour une créature d’élite comme celle-là, pour une fille de Marie, combien de filles d’Ève !…
— Mais cette pauvre jeune femme, qui n’a d’autre défaut après tout que d’aimer la lecture et la solitude, vous la traitez presque comme une pécheresse, messieurs ! Curé, cela n’est pas charitable, il me semble !
— Tout à l’heure, en revenant de Périllac, où j’avais été faire le catéchisme, pour le curé qui est au lit, j’ai trouvé la vicomtesse assise au beau milieu d’une châtaigneraie, malgré l’humidité, malgré le vent… car vous conviendrez qu’il fait un temps…
— Un temps à prier pour les pauvres voyageurs, interrompit la bonne madame Margerie.
— Elle lisait… ? demanda le docteur.
— Un livre dangereux entre tous les mauvais livres : René.
— Un mauvais livre ? s’écria madame Margerie en joignant les mains et levant au ciel des yeux pleins d’une douloureuse consternation.
— Oh ! pas comme vous l’entendez, chère madame. Mais il n’y a pas de mauvais livres que ceux qui peignent à l’imagination des scènes libertines ou qui prêchent l’impiété et l’athéisme ; il y en a d’autres qui sont pleins, je ne dirai pas de religion, mais de religiosité, et qui pourtant glissent dans les âmes un poi-