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adolescent, qu’elle lui façonnerait le cœur à toutes les noblesses, qu’elle lui ouvrirait l’intelligence à toutes les grandeurs. La maternité morale lui apparut comme à la lueur d’un éclair avec ses trésors de dévouement et ses jouissances infinies… Elle se prit à plaindre Louis qui, dans ce grand naufrage, n’avait pour consolations humaines que des rêves d’ambition…

Toutefois elle ne triompha pas soudain de la passion qui avait grandi lentement en elle. Après avoir multiplié ses travaux, ses courses, les mille soins de son intérieur, elle éprouvait de terribles désespoirs ; il lui prenait de folles tentations de rappeler l’amant qu’elle avait exilé… On ne passe point ainsi de toute l’efflorescence des belles années au désintéressement austère de la vieillesse ; le renoncement absolu ne s’établit pas sans combat dans une âme vivante… Les mois, les années s’écoulèrent avant que Jeanne eût oublié le goût des ivresses d’amour auxquelles son cœur s’était livré… Peu à peu, cependant, les crises douloureuses devinrent plus rares… Elle usa son ardeur dans une activité dévorante… Enfin, la paix se fit et le roman de la noble fille tourna sa dernière page. La douairière de Mauguet commençait son œuvre.