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remit sans parler une lettre cachetée de noir. Elle l’ouvrit et lut :


Ma chère sœur,

« Ceci est mon testament, l’unique, hélas ! que la révolution m’ait laissé le pouvoir de faire ! Je vous lègue mon fils, un orphelin, et le dernier de sa race. Il vous dira comment j’ai été frappé d’une balle française à … en combattant pour le roi.

« L’homme qui vous le conduira est son précepteur… un brave Allemand, bien dévoué, et auquel je vous prie de témoigner toute la reconnaissance que vous pourrez.

« Au moment de paraître devant Dieu, je me reproche, ma chère sœur, d’avoir porté les armes contra mon pays. La patrie, même dans ses égarements, doit nous rester sacrée. Je me reproche aussi le mauvais accueil que j’ai fait à l’annonce de votre mariage. J’aurais dû penser que si vous en agissiez ainsi, c’était en sûreté de conscience, parce que vous ne pouvez faillir ni à l’honneur, ni au dévouement pour votre maison.

« Si donc il est fait, ce mariage, j’ordonne à mon fils de traiter M. Thonnerel comme son oncle. Je lui apprends en même temps ce que la mauvaise fortune a dû lui faire pressentir depuis ses plus jeunes années, c’est-à-dire qu’il n’a que la cape et l’épée. Je ne saurais, vous le comprendrez, accepter pour lui les mor-