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fallait retourner maintenant à la vie solitaire et froide, au parti pris de la résignation.

Louis ne soupçonnait pis l’orage qui grondait alors dans l’âme de sa compagne. Il en était resté aux impressions tendres et douces du retour à travers le bois.

Quand il se vit au sommet de la rampe et près d’atteindre la terrasse, il retint Jeanne, la força de se retourner et lui montra le paysage, qui, baigné en même temps dans la lumière et dans la brume, semblait un décor du pays des fées.

— Quelle bonne journée, quelle radieuse soirée à mettre dans nos souvenirs ! dit-il.

— Oui, reprit Jeanne, qui ne put résister à laisser encore ses yeux errer sur cette campagne qu’elle venait de traverser, en proie à de si délicieuses émotions.

Puis, tout à coup, pour vaincre une nouvelle tentation peut-être, une tentation folle de redescendre en courant, au bras de Louis, la rampe de l’étang, et de parcourir encore les bois, les prés et les landes, le cœur ouvert à toutes les ivresses, elle s’élança dans la grande salle de Mauguet.

Louis y entra après elle et la rejoignit. Le changement de milieu modifia soudain leurs impressions. Tous deux revinrent vile à la réalité. Cependant la fin de cette promenade avait trop ému Jeanne pour qu’elle pût rester en face de Louis sans trouble. Elle prétexta quelques soins à donner au souper, et sortit.

Quand, une demi-heure après, ils s’assirent à la même table, ils étaient plus inquiets qu’heureux.