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individuelle… Mais, au bout de ce raisonnement, la logique me conduirait à la déclaration des droits de l’homme !…

Cette réflexion jeta Jeanne dans une perplexité singulière et dans une agitation fébrile, que le souvenir des paroles de Sylvain Aubert ne suffisait point à calmer. Elle aimait à se les remémorer pour apaiser ses scrupules ; mais je ne sais quoi restait à convaincre en elle. Cette créature austère, toute de dévouement et de vertu, s’efforçait encore de comprimer son cœur pour laisser parler les voix les plus intimes de sa conscience.

Que si, parfois, le voile de chair qui cache nos pensées pouvait s’entr’ouvrir, les âmes humaines se donneraient l’une à l’autre un magnifique spectacle ! Ainsi, ce soir-là, Jeanne, seule dans son vieux château ruiné, se promenant dans le salon au bruit du vent d’automne qui sifflait dans les grands arbres, et luttant à outrance contre June passion d’autant plus violente qu’elle était plus comprimée, n’était-elle pas un exemple de tout ce que peut la volonté contre la tentation ?

Car, elle était tentée par tout ce que l’esprit peut suggérer de raisons déterminantes et par tout ce que le cœur peut déployer de séductions. Elle se sentait aimée d’un amour absolu par un cœur loyal, dévoué, courageux, en tout digne du sien, et elle aimait en même temps, avec toute la fraîcheur d’un premier amour et toute l’ardente énergie d’une passion su-