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» En tombant j’eus soin de chasser hors de la poche de mon gilet la carte de Charles Villardier et mes deux louis.

» On se précipita, cela va sans dire, à mon secours, et au bout de dix minutes, quand elle sut que je ne reprenais pas connaissance, la déesse daigna venir elle-même jeter sur son amoureux inanimé un regard, — dirai-je d’intérêt ? — non, de curiosité.

» Et il me sembla – je voyais un peu à travers mes paupières mi-closes — que demi-intéressée, demi-dédaigneuse, elle se disait :

» — Qu’est-ce que cela peut être que ce garçon-là ?

» Précisément un domestique ramassa la carte ; elle fit un signe, on la lui tendit – cette fois je ne me trompais pas, l’éclair d’une idée passa dans ses yeux. Je n’en attendis pas davantage, et je revins à moi.

» Les domestiques venaient de ramasser aussi les deux louis qui avaient roulé. Ils me les présentèrent en même temps que la carte, comme j’ouvrais les yeux. Je pris machinalement la carte ; quant aux louis — mes uniques ! et nous étions au milieu du mois, – je les repoussai d’un geste alangui en murmurant : « Gardez !… »

» On m’avait assis sur un fauteuil, entre la porte et la cheminée ; la femme de chambre me faisait respirer des sels ; le laquais attendait qu’on lui donnât quelqu’ordre.

» — Laissez-nous, dit Sarah Bertin après un moment d’incertitude.

» Ses domestiques sortirent, et je demeurai seul avec elle ; moi reprenant mes sens peu à peu, et sans oser