– Je descendrai au premier relai ; je l’emporterai roulé dans mon manteau. Tu continueras la route seule avec Annette et la sage-femme, jusqu’à un endroit convenu, où tu t’arrêteras et où je devrai vous retrouver.
— Je ne m’arrêterai pas un jour, pas une heure ! Je ferai tourner bride et reviendrai chez moi.
– Tu sauveras ta vie d’abord ; car une fois l’enfant et moi partis, l’honneur sera sauf, et tout peut s’expliquer au besoin… J’exige que tu te conformes aux prescriptions de la matrone.
– J’obéirai donc. Et maintenant, l’enfant ?
— J’en aurai soin… comme du mien ; Éléonore, ne crains rien.
— Mais encore ?
– Eh ! bien ! je gagnerai une bourgade assez éloignée. Là, je ferai la déclaration de naissance, et chercherai une bonne nourrice à laquelle je laisserai notre cher petit.
– La déclaration de naissance sera ?
– Père et mère inconnus. C’est la meilleure en pareil cas, parce qu’elle réserve tout. En même temps, d’ailleurs, je me chargerai d’élever l’enfant.
– Et… on acceptera ?… Comment ?
— Que répondre à un homme qui vient présenter un enfant devant l’officier de l’état civil, en disant : « Voilà un enfant que je viens de trouver, au coin d’un chemin, je l’ai ramassé, je l’apporte, il m’intéresse ; j’ai quelque fortune ; ma position sociale est honorable, je me charge de pourvoir à ses besoins ? »
— Rien, en effet, il me semble.