Page:Cadiot - Chateau-Gaillard.pdf/17

Cette page n’a pas encore été corrigée

Ce jeune homme, d’ailleurs, était bien connu dans l’entourage de l’intéressante malade. On le trouvait assidu, chaque jour, à aller prendre de ses nouvelles et lui conter les bruits de la ville. Il jouait avec les enfants, et quelquefois reconduisait le docteur Alibert, à travers le salon, jusqu’à l’escalier.

Visiteurs et visiteuses lui faisaient fête : car Lucien Mériot n’était pas seulement un élégant renommé au manège Sourdis et au jeu de paume Charrier ; portant à ravir le frac vert saule, la culotte de tricot et les bottes de Sakowsky. C’était encore, c’était surtout un poëte déjà célèbre et promis, disait-on, à de hautes destinées ; et, en attendant, auditeur au conseil d’État.

Voulait-elle confondre son ami dans le nombre, ou l’encadrer ? le perdre, ou le mettre en valeur ? je ne sais. Mais madame Hérouard avait ouvert sa maison au monde littéraire de son temps. On y rencontrait à la fois les célébrités faites et les réputations futures : Étienne, Jouy, Delille, Baour-Lormian, y coudoyaient Lebrun, Ducis, Piis, Dupaty, Boïeldieu, Dalvimare, sans parler d’un jeune statuaire, élève de Lemot, — Pradier ; d’Auber, alors au début de ses succès de salon qui précédèrent ses succès de théâtre ; d’Auber, gai, spirituel, aimable ; et d’un tout jeune homme, aux traits purs, à la taille élancée, que sa triple qualité de dandy, de collaborateur de Jouy et de secrétaire-rédacteur au cabinet de l’empereur, désignait dès alors à l’attention, et qui, après avoir fait partie de la rédaction du Nain Jaune et du Journal des Débats sous la Restauration, devait devenir un des sénateurs les plus connus du second Empire.