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mais cependant plus simples et plus vrais.

Sous le régime bienfaisant de l’égalité, sous l’influence toute-puissante de la raison publique, libre enfin de toutes les chaînes dont l’avoient chargé les absurdités politiques, civiles ou superstitieuses, étranger à toute exagération, à tout enthousiasme ridicule, l’amour sera le consolateur, mais non l’arbitre de la vie ; il l’embellira, mais il ne la remplira point. Lorsqu’il la remplit, il la dégrade ; et bientôt il s’éteint lui-même dans les dégoûts. Bacon disoit de son temps que cette passion est plus dramatique qu’usuelle : plus scenœ quàm vitæ prodest. Il faut espérer que dans la suite, on dira le contraire. Quand on en jouira moins rarement et mieux dans la vie commune, on l’admirera bien peu telle que la représentent, en général, nos pièces de théâtre et nos romans. Bacon prétend aussi, dans le même endroit, qu’aucun des grands hommes de l’antiquité ne fut amoureux. Amoureux, dans le sens qu’on attache ordinairement à ce mot ? Non assurément. Mais il en est peu qui n’aient cherché dans le sentiment le plus doux de la nature, dans un sentiment qui devient la base de tout ce que l’état social