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plus foibles, et remontant jusqu’aux plus anciennes qui sont les plus durables. Et à mesure que celles dont la mémoire étoit comme surchargée, s’évanouissent, les précédentes, qu’elles offusquoient, reparoissent. Bientôt tous les intérêts, toutes les pensées qui nous ont le plus occupés dans le cours des âges postérieurs, n’existant plus pour nous, les momens où nous avons commencé de sentir, peuvent seuls rappeler encore vers eux nos regards ; ils peuvent seuls ranimer notre attention défaillante : jusqu’à ce qu’enfin nous cessions d’être, en perdant presque à-la-fois, et les impressions du moment présent, et les traces de ces images brillantes et magiques que laissent, dans notre cerveau, les premières lueurs de la vie.

Il n’est pas rare de voir les vieillards tomber dans une véritable enfance. Non-seulement leurs idées et leurs passions se rapportent alors uniquement aux mêmes appétits directs que celles de l’animal qui vient de naître, mais ils reprennent encore cette même mobilité qui caractérise les enfans[1].

  1. Le célèbre duc de Marlborough, que l’on ne peut pas soupçonner d’avoir manqué de fermeté dans la jeunesse et dans l’âge mûr, devint, dans la vieillesse,