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paisiblement sa marche ; lorsqu’on ne la hâte, ni en l’excitant, ni en la réprimant (car cette dernière méthode est encore un genre d’excitation), l’homme, ainsi que les animaux moins parfaits, prend tout-à-coup, à cette époque, d’autres penchans, d’autres idées, d’autres habitudes. L’éloignement des objets qui peuvent satisfaire ces penchans, et vers lesquels ces idées se dirigent alors d’une manière tout-à-fait innocente et vague, n’empêche point un nouvel état moral de naître, de se développer, de prendre un ascendant rapide. L’adolescent cherche ce qu’il ne connoît pas : mais il le cherche avec l’inquiétude du besoin. Il est plongé dans de profondes rêveries. Son imagination se nourrit de peintures indécises, source inépuisable de ses contemplations : son cœur se perd dans les affections les plus douces, dont il ignore encore le but ; il les porte, en attendant, sur tous les êtres qui l’environnent.

Chez les jeunes filles, le passage est encore plus brusque et le changement plus général, quoique marqué par des traits plus délicats. C’est alors que l’univers commence véritablement à exister, que tout prend une âme et une signification pour elles ; c’est alors