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juste, ce mot doit exprimer le système méthodique des signes par lesquels on fixe ses propres sensations. Un enfant, avant d’entendre et de parler la langue de ses pères, a sans doute des signes particuliers qui lui servent à se représenter les objets de ses besoins, de ses plaisirs, de ses douleurs ; il a sa langue. On peut penser, sans se servir d’aucun idiome connu ; et sans doute il y a des chiffres pour la pensée comme pour l’écriture.

Mais, je le répète, sans signes il n’existe ni pensée, ni peut-être même, à proprement parler, de véritable sensation, c’est-à-dire, de sensation nettement apperçue et distinguée de toute autre[1]. Nous avons dit que

  1. Pour distinguer une sensation, il faut la comparer avec une sensation différente : or, leur rapport ne peut être exprimé dans notre esprit, que par un signe artificiel, puisque ce n’est pas une sensation directe. Il ne s’ensuit point de-là que les signes précédent les idées ; les matériaux des idées existent bien certainement, au contraire, avant les signes : mais, pour devenir idées, il faut que les sensations, ou plutôt leurs rapports, se revêtent de signes. On voit que j’attache au mot signe un sens bien plus étendu que les analystes ne l’ont fait jusqu’à présent.

    Au reste, ce n’est ici qu’une pure question de mots.