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En guerre avec le duc de Lorraine, le Roi avait dû partir précipitamment pour Marsal, laissant sa maîtresse dans une position qui ne laissait pas de lui causer du souci ; c’est alors qu’il s’était ouvert à Colbert du service qu’il attendait de sa fidélité.

Il se trouvait précisément que Mme Colbert, bourgeoise de bon renom, était quelque peu compatriote de Mlle de La Vallière : elle était, en effet, originaire du Blésois, où elle avait pu connaître les La Vallière ou les Saint-Remi. Mais si la préférence du Roi s’était portée sur elle, c’est qu’elle était « experte en nourriture d’enfants », en ayant élevé pas moins de sept pour son propre compte[1]. Au surplus, ce ne pou-

    C’est encore Colbert qui fut plus tard chargé de mettre à la raison M. de Montespan, qui « avait menacé de voir sa femme ». M. Clément prétend qu’il ne faut pas juger les frasques royales avec les idées du xixe siècle. « Il n’y a pas lieu de s’étonner, dit ce censeur indulgent, de cette condescendance d’un des ministres les plus austères pour les faiblesses du roi, à une époque où Louis XIV se montrait publiquement dans le même carrosse avec Marie-Thérèse, La Vallière et la Montespan, pendant que le peuple disait tout bas, en les voyant passer : Voilà les trois reines ; où il faisait légitimer tous ses bâtards par le Parlement, etc.. Il faut, conclut M. Clément, que le roi eût eu jusqu’à un certain point pour complices les idées et les mœurs de son temps ». Sans être plus rigoriste qu’il ne convient, nous ne pouvons nous empêcher de déplorer le triste rôle que joua, dans cette circonstance, le plus grand ministre du plus grand de nos rois. Heureusement, « ces services d’intérieur » n’ont tenu que peu de place dans la vie de J.-B. Colbert.

  1. Lair, Louise de la Vallière et la jeunesse de Louis XIV, p. 122.