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plusieurs mois avant de prendre les mesures qu’imposaient les circonstances. Nombre d’étrangers étaient fixés à Paris, considéré déjà comme l’auberge du monde, le foyer autour duquel gravitaient tous les hommes cultivés qui aspiraient à vivre au sein de la société la plus brillante, la plus spirituelle, la plus policée de l’univers.

Les Allemands s’étaient montrés, entre tous, empressés à s’installer chez nous, non pas tant, comme ils le laissaient à entendre, parce qu’ils considéraient notre pays comme un Éden paradisiaque, mais parce que la France leur apparaissait comme la terre promise de la liberté, notre pays comme le champion de la justice universelle. Il n’y avait plus que des hommes, que des frères. Le courant de fraternité humaine était si fort, qu’un Constituant, l’académicien Target, proposait, le 30 avril 1790, de naturaliser en bloc tous les étrangers domiciliés en France depuis cinq ans et y possédant quelque avoir. Ce projet, qui fut voté d’enthousiasme et sans débat, répondait si bien aux sentiments de l’opinion, qu’en mainte localités, les municipalités avaient, d’elles-mêmes accordé le droit de suffrage et le droit d’éligibilité aux étrangers qui résidaient dans les villes qu’ils administraient.

Il suffisait d’y avoir acquis un immeuble ou d’avoir épousé une Française, d’avoir fondé un établissement de commerce ou d’avoir reçu des lettres de bourgeoisie, pour obtenir les mêmes droits que les autochtones. Étant donné cet état d’esprit, on ne saurait être surpris que l’idée d’organiser et d’armer des légions franches composées d’étrangers, venant