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engagent un dialogue des plus animés pour tenir les badauds en haleine.

Sur un signe convenu, le poète s’avance et consent à se laisser examiner la bouche. Le charlatan reconnaît que le patient qui se présente à lui a deux dents gâtées et que, « s’il n’y prenoit garde de bonne heure, il courrait fortune de les perdre toutes ».

Résigné à son infortune, Sibus se livre à l’opérateur, non sans faire la grimace. « La douleur qu’il sentoit estoit si forte qu’elle luy faisoit à tous momens oublier sa résolution. Il se roidissoit contre son charlatan, il s’écrioit, reculant la teste en arrière ; puis, quand l’autre avait été contraint de le lascher : « Ouf ! continuoit-il, portant la main à sa joue et crachant le sang, ouf ! il ne m’a point fait de mal ! »

Comment pouvait-on le croire, lorsqu’on voyait cet homme « les larmes aux yeux, vomissant le sang par la bouche, s’écriant comme un perdu ?… Aussi quoiqu’il en dit, y avoit-il peu d’apparence que le charlatan luy-mesme, au lieu de deux dents qu’il avoit mises en son marché, ne luy en voulut arracher qu’une ».

La fin de l’histoire est des plus réjouissantes. Le soir, quand le malheureux se présente chez l’opérateur, pour toucher le salaire convenu, celui-ci refuse d’exécuter sa promesse, « alléguant qu’il avoit tant crié qu’il luy avoit plus nuy que servy ; qu’il ne