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bohème déguenillé, qui se nommait Sibus, poétereau à ses heures, et dont la silhouette à la Callot mérite un rapide croquis.

Comme Panurge, il vivait le moins possible à ses dépens et le plus possible aux dépens d’autrui ; par économie, il écrivait avec son ongle, toujours maintenu fort long et taillé en forme de plume. De la suie délayée lui servait d’encre. Un trou percé dans la muraille de sa chambre lui permettait d’utiliser le soir la lumière qui éclairait son voisin. Il se chauffait en hiver aux tas de fumier élevés dans certaines cours, et se nourrissait de la fumée des viandes exposées à l’étalage des rôtisseurs.

Un jour maigre, cette chère peu substantielle lui ayant manqué, il alla sur le Pont-Neuf et offrit à Cormier de se laisser arracher deux dents en public, s’engageant à protester tout haut devant les assistants qu’il n’avait ressenti aucune douleur. Cormier accepta, et le marché fut conclu moyennant dix sols, que le poète devait toucher après l’opération[1].

Suit une scène inénarrable, où les deux compères

  1. Alf. Franklin. Variétés chirurgicales. Paris, 1894.