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V


Un vent furieux s’élève, chassant devant lui les nuages déchirés : on dirait le hurlement du Remords qui s’acharne sur les grands coupables. Les cataractes du ciel s’ouvrent, la pluie tombe épaisse et rapide. Les rues sont désertes en un instant. Sous l’auvent du grand toit, près de la fenêtre de Marina, s’est abritée l’hirondelle qui rappelle ses petits sous son aile tremblante et pousse des cris d’effroi.


— Et Marina qui l’entend se lève de son travail : « Oh qu’as-tu, lui dit-elle, pauvre mère venue de si loin ? Le martinet aux serres cruelles a-t-il ravi le fruit de tes amours ? Ou bien le passereau fainéant s’est-il installé dans ton beau nid si péniblement élevé ? As-tu froid ou faim ? As-tu peur ? Les hommes t’auraient-ils blessée ?

« Chère petite ! viens près de moi, je te défendrai, j’étancherai le sang de tes plaies. Les pauvres ne se trahissent point ; et ma mansarde, mon dernier pain, mon plus fin morceau de toile blanche sont à toi comme à moi. Ne partages-tu pas toutes les émotions de ma vie ? Quand je suis triste, je te vois en deuil et nous pleurons ensemble. Quand je suis en fête, tu secoues tes plumes au soleil, et nous chantons. Et les anges qui passent tout près emportent sur leurs ailes les soupirs de nos cœurs. »


— Et l’hirondelle qui la comprend, répond :