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l’œil fixe, les cheveux épars, et le doigt sur la lèvre !

Toi que suit le jeune homme par les rues dépavées, sur les champs de bataille, dans les mondes inconnus !

Liberté, Liberté, ma sainte et ma maîtresse, écoute ma prière :


Qu’elle était fière et grande, sur les remparts croûlants, Saturnina la brave, la Romaine à l’œil noir ! Avec sa robe grise elle semblait porter le deuil de la patrie mourante, elle s’était fait une écharpe du drapeau d’Italie. Sur le sable, autour d’elle, bondissaient 572 les boulets aux écarts imprévus. Ses narines se dilataient à l’odeur de la poudre, comme celles d’une cavale au simoun des déserts.

Les Français avaient roulé jusqu’au Tibre leurs tirailleurs gris comme la fumée de poudre ; ils lui avaient tué son amant, le bersagliere lombard !

Et Saturnina s’était penchée sur son corps, elle avait pris dans sa main frêle sa carabine de combat, et d’un lambeau de sa tunique s’était fait du soldat mort un souvenir sacré !

Elle ne voyait plus dans le monde que trois choses belles et désirables :

L’armée des ennemis qui présente la rangée de ses poitrines aux balles meurtrières ;

La Vengeance qui charge les armes, éclate avec la poudre et va défigurer les hommes du Nord ;

Et la Mort qui console, la Mort aux grands do-