Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/454

Cette page a été validée par deux contributeurs.

quelque ordre du jour révolutionnaire, et votre cerveau quelque opinion subversive.

Sois fière, ô noble France ! Ta police est la première du monde ; tu tiens en Occident le sceptre de la Délation et du Parjure ; tu n’enfantes plus d’autres héros que des mouchards ; ton nom veut dire insulte à la liberté ! Car partout on sait comment tes agents gagnent leur misérable existence, et quiconque se promène avec la croix d’honneur devient suspect d’espionnage ou d’escroquerie. 556 Et non contente de ton opprobre, tu contrains les faibles gouvernements qui t’entourent à te suivre, du plus loin qu’ils peuvent, dans la voie du déshonneur.

Sois fière, tu es dignement représentée dans tous les estaminets et lieux sans nom des capitales. C’est là qu’on chante tes victoires entre deux parties de piquet, avec l’enthousiasme que donnent l’absinthe et le trois-six. C’est là qu’on apprécie la tête d’un proscrit, le courage d’un capitaine, la conscience d’un ministre, la portée d’une révolution, la conduite d’une guerre ou la solidité d’un trône.

Et vivent les grosses panses et les trognes vermeilles ! Vivent les Johns Falstaffs et autres Macaires et Mercadets du glorieux pays où j’ai reçu le jour !


Donc vous m’avez traqué de buisson en buisson, de frontière en frontière comme un oiseau blessé. Donc vous m’avez fait expulser, sous prétexte