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Reprends donc courage, mon âme, franchissons résolument ces dernières étapes de douleur. Me verrait-on céder devant la tâche monotone que j’ai choisie, quand l’ouvrier ne s’arrête pas, lui, devant le travail accablant qu’on lui impose ? Me verrait-on céder ?

Non certes. Je veux me raidir contre les séductions du repos, je veux écrire encore ces lignes difficiles. Tant mieux si elles me coûtent quelque peine et des larmes ! Car je les verserai sur ce papier, comme le pauvre verse sa vie sur la matière qu’il façonne.

Et peut-être réussirai-je à séduire, à émouvoir ceux qui n’ont pas formé dans leur cœur la coupable résolution de protéger le mal. Ce sera difficile :

L’Enfer est sur la Terre !


Station de l’Hôtel-Dieu ! — Le travailleur y est porté dans un brancard, sur un matelas puant, sous des couvertures sales et lourdes qui empêchent à l’air d’arriver jusqu’à lui. Il y est porté par deux hommes qui ne lui sont rien, qui s’arrêtent à chaque 512 bouchon pour rire et boire, tandis que les curieux examinent tout à leur aise l’aspect du patient.

Il y entre par une porte encombrée de malheureux comme lui. Ceux-ci le surveillent avec envie, car il leur dispute le dernier lit vacant.

Il y reçoit tous les matins la visite d’un médecin à l’œil indifférent, qui l’examine pour l’amour