Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/369

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tordus par des coliques tellement dilacérantes que nulle parole ne saurait les décrire. Alors ils prennent les attitudes les plus contractées 501 les plus torturantes, afin d’échapper à l’excès des douleurs. La respiration manque, les battements du cœur sont suspendus ; il semble que l’angoisse diminue le volume du corps ; la peau de leur ventre se rapproche des os de leur dos ! Ils se roulent dans des convulsions effrayantes, pareilles à celles des épileptiques ; mordus par la souffrance, ils poussent des hurlements lamentables, comme ces damnés que Dante nous montre plongés par la tête dans la poix fondue. Tout sommeil leur est refusé ; pendant la nuit, la douleur traverse la moëlle de leurs os comme une lame de rasoir chauffée à blanc. Ils sont pris par ce délire sombre, infernal, muet, sans extases et sans haleine que la Mort laisse tomber, de ses ailes funèbres, sur la couche des moribonds. Eux-mêmes ne peuvent comprendre comment la vie s’acharne sur leurs membres destinés à une paralysie prochaine ; vingt fois, dans leurs accès, ils invoquent la mort, suprême remède des maux incurables. Et la Mort ne vient pas, l’entêtée qui fuit ceux qui l’appellent, et court, tête basse, sur ceux qui la fuient.

L’Enfer est sur la Terre !


J’appelle ces fabriques de poisons les antichambres du cimetière. Je compare les ouvriers qui travaillent la céruse à des cadavres vêtus de deuil, animés d’un mouvement mécanique et destinés à