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glaciers des Alpes vont se convertir en autant de volcans. Au sommet du Mont-Blanc, sur sa couche éternelle, le Génie des solitudes s’est relevé pour un travail immense.

Bientôt des villes et des villages disparaîtront dans des lacs de soufre et de lave vomis par le globe en transformation. D’énormes blocs de rochers s’écrouleront sur les récoltes et les demeures des hommes. Les cloches de bien des églises sonneront le dernier tocsin. Et la lueur sinistre des incendies, s’allumant de toutes parts, éclairera ces scènes de mort.

Aux rivages des mers, au pied des monts, sur les eaux des grands fleuves, au milieu des prairies, les hommes se rencontreront, 492 fuyant du nord au midi leurs maisons flamboyantes. Matin et soir ils dresseront leurs tentes sous de nouveaux cieux. Les plus étrangers se connaîtront, se fréquenteront. Les races, les mœurs, les langues, les hommes et les femmes se mêleront dans des croisements sans fin. Bourgeois et barbares dont le plus noble instinct consiste à faire l’amour en tous temps, bourgeois et sauvages ne seront plus occupés que du soin minutieux de se reproduire. On en trouvera partout, dans les fentes des rochers, à l’ombre des haies, au bord des frais ruisseaux. Et la génération tôt venue qui sortira de ces inclinations ne saura guère si elle est fille de curés ou de Cosaques.

Car il faut bien enfin que la terre secoue l’homme, puisque l’homme veut rester immobile,