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Du moins, dans la bataille, les officiers tombent à côté des soldats et la Guerre n’est pas pour eux une fortune sans dangers. Du moins le soldat meurt dans l’ivresse d’une affaire chaude, par la balle ou l’épée.

Tandis que le prolétaire se consume dans le désespoir d’un travail éternellement monotone qui rompt ses membres et aigrit son cœur. Son premier champ de bataille, c’est l’hospice, et son dernier l’hôpital, où il se tord dans une lutte suprême contre le Mal et l’Agonie. Dans ces sombres asiles, il n’entend guère que les voix larmoyantes du prêtre et de la religieuse, que des cris et des sanglots qui décourageraient les plus forts ; sur leurs tristes frontons, il voit déployés des drapeaux noirs. C’est la funèbre enseigne de la seule hôtellerie qui s’ouvre pour le pauvre !

Les drapeaux du roi s’avancent, du roi des Enfers !


V


« Nous arrachons la houille à la terre fangeuse ;
La nuit couvre nos reins de sa mante brumeuse,
Et la mort, vieux hibou, vole autour de nos fronts. »
A. Barbier.


Je monterai sur le clocher de l’église prochaine. Et je verrai défiler, au petit jour, le sombre peuple des travailleurs qui se traîne, plus las que la veille, à son travail accoutumé.