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mondes, comme la rose parmi les fleurs des jardins, comme la fauvette au milieu des petits oiseaux, comme chez nous, mortels, l’enfant qui voit le jour !

» Âme des Univers, souveraine Révolution ! accorde-moi cette grâce, à moi qui ne t’ai jamais demandé rien, à moi qui perds la voix en chantant tes louanges, à moi qui dois mourir pour te faire vivre parmi les hommes. Fais-moi cette grâce, souveraine Révolution !

» … Je voudrais m’endormir, la tête sur son sein, avec une tresse de ses cheveux entre mes lèvres, mes dents contre ses dents, le battement de mon cœur attentif au battement de son cœur. Avec elle je voudrais mourir, et puis renaître dans la félicité suprême, et monter, et tourner, et m’agiter toujours, de mondes en mondes, de cieux en cieux !

» Éternité d’amour ! Éternité d’existence, mouvement transformateur qui jamais ne s’arrête, extase, poésie, harmonies ineffables, infini de bonheur, la Vie, toujours la Vie ! !… Voilà ce que je rêve auprès de ma Sarah qui va mourir ! !…

» … Oh ! qu’elle est belle ainsi, Sarah la poitrinaire, frappée par la rouge lueur du crépuscule ! Elle ressemble au jonc fleuri qui expire le soir sur les eaux qui le pleurent ! Mais pourquoi donc l’aimé-je autant ? C’est que je divinise en elle l’Humanité d’aujourd’hui, pauvre race épuisée de souffrances qui ne se régénérera que dans la Mort !

» C’est qu’il est bon d’aimer ! — Non pas un seul être, une seule famille, une seule nation, abru-