Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/274

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Et je me jetai dans ses bras ouverts, et toute la nuit je reposai paisiblement sur sa poitrine.

Et le matin venu — « Grand-père aimé, lui dis-je, quand, oh ! quand donc me sera-t-il permis de déposer cette plume brûlante, et de vous suivre jusqu’à perdre haleine dans le cercle d’or des éternelles transformations ? »

— Et lui à moi : « Pauvre enfant de l’homme, elles passent donc bien lentement sur ton âme attristée, les heures rapides ! ?… Pour que déjà tu sois épris de la Mort décharnée !

» Vis ton heure, bois ta seconde, imprudent ! Pourquoi toujours chercher au fond de la coupe remplie ?… Pour y trouver du fiel ? !

» Vois ! Le vin est vermeil, et chaud le sang de tes artères, et fraîche la jeune fille comme une rose de mai !

» Brise ton corps de fatigue et laisse reposer ton âme lassée. La Mort est capricieuse ; elle fuit quand on l’appelle et se cache derrière les cyprès des tombes, comme la bergère de Virgile, entre les saules du ruisseau. Elle n’obéit aux ordres de personne.

» Vis, sois heureux. Grave sur ton front et sur tes reins ces sublimes paroles du royal Sardanapale :

» Mangez, buvez, aimez ; tout le reste n’est rien. »

442  » Là seulement est la sagesse des hommes et des nations ! »

— » Je m’efforcerai, grand-père, de suivre vos