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Moi qui n’ai connu le monde que de loin, en passant mon chemin à travers les sociétés pressées, en me hâtant vers le but que désirait mon cœur… hélas ! que j’en ai vu mourir de jeunes femmes !

— Non pas d’excès de danse, pour une intrigue dévoilée, pour un bouquet perdu ; non pas dans les salons dorés, sous les lustres des bals où viennent les recueillir des poètes indulgents aux vanités du jour ; non pas ensevelies dans une robe de lumière et de gloire ! Mais seules, désespérées, étouffées, sanglotantes dans les ténèbres de l’alcôve conjugale ! —

380 Combien vendues à des vieillards, à des épileptiques, à des crétins, à des rois ; à pires encore !

Combien enchaînées à des avares, à des coureurs de filles, à des ivrognes que la colère emporte et qui les martyrisent chaque soir pour leur témoigner leur attachement !

Combien livrées à des centaures qui leur répugnent et brisent leurs âmes délicates sous de grossiers transports !

Combien forcées par des maris infâmes de se vendre au plus offrant !

… Ainsi frappe l’injustice des hommes !


Que d’autres privées, par intérêt sordide, d’argent, de nourriture, de sommeil, des plus simples vêtements que la pudeur réclame !

Que d’autres dont on détruit la santé pour recueillir plus tôt l’héritage !