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let ; et cette femme n’eût pas tremblé, n’eût pas reculé d’effroi devant la mort d’un homme ! Elle l’eût refroidi de gaîté de cœur ; elle eût fait de l’art pour l’art ! — Je le nie.

Vous dites qu’elle convoitait la fortune de son mari, qu’elle était fatiguée de sa cohabitation, qu’elle en aimait un autre. Et ce sont des juges, des gens du grand monde, qui réclament une tête sur de pareilles preuves morales !

Cependant il ne vous est pas permis d’ignorer, MM. du Parquet, beaux histrions des planches, que si le mariage n’existait pas, les dames galantes l’inventeraient afin d’être plus libres dans leurs amours. Et la rouée, l’impudente, la dénaturée, l’hypocrite par excellence, madame Lafarge, aurait été assez simple pour brûler par l’estomac son commode paravent de mari, quand il est si naturel et si bien reçu de se divertir du déshonneur des hommes ! — Je le nie.

Vous savez aussi, et par expérience, combien facilement les femmes se dérobent à la fréquentation des hommes qu’elles abhorrent. Avec six nuits d’indisposition et six jours de dédain, les voilà quittes ; elles n’ont qu’à prendre la peine de froncer la lèvre et de tourner le dos. Ah s’il leur était indispensable de recourir à l’arsenic pour balancer le joug conjugal, je te bénirais, ô divine substance ! Car prompte et sévère justice serait faite à la fin de tous les assassins légaux qui se marient et fatiguent de tendres femmes des remords de leurs nuits !