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brûle pas la conscience du véritable empoisonneur de M. Lafarge !


Du jugement d’une poignée de bourgeois censitaires j’en appelle au tribunal de l’Avenir. Et j’ai la certitude qu’il déposera sur cette tête sacrifiée la double et radieuse couronne de gloire et d’amour.

J’ai déjà prouvé quelque part que les hommes n’avaient pas le droit de se ravir l’existence ou la liberté[1]. Je n’y reviendrai plus. Je veux seulement demander aux juges de madame Lafarge s’ils pourraient établir sa culpabilité sur d’incontestables preuves ? Et s’ils ne le peuvent pas, je leur crie par la voix de l’éternelle justice : Pourquoi donc l’avez-vous condamnée ? Dans quel enfer 370 êtes-vous aujourd’hui ? Qui vous tirera du pétrin de sang caillé, de l’abîme de soufre et de charbon ? Qu’avez-vous fait d’une âme de femme ? Et comment rachèterez-vous de ce verdict vos mémoires détestées ?…


À tout crime il faut des mobiles assez impérieux pour l’emporter, dans l’esprit du coupable, sur la crainte de la loi, sur l’horreur que lui inspirent ses propres desseins. — Or quels motifs tellement puissants, tellement inexorables pouvait avoir madame Lafarge d’empoisonner ce brave limousin qui lui servait d’époux et qui ne demandait qu’à vivre ? Mais un cuisinier souffre à saigner un pou-

  1. Jours d’Exil, première partie, article Montcharmont.